La névralgie pudendale : comprendre, diagnostiquer et soulager avec l’ostéopathie
La névralgie pudendale (aussi appelée neuropathie pudendale ou syndrome du canal d’Alcock) est une affection chronique très douloureuse qui touche le nerf pudendal. Ce nerf mixte assure à la fois la sensibilité et la motricité du périnée, des organes génitaux externes, de l’anus et d’une partie du plancher pelvien. Toujours mal connue du grand public comme de certains soignants, elle reste largement sous-diagnostiquée, alors qu’elle engendre souvent une souffrance physique intense et un retentissement psychologique majeur. Elle peut concerner les hommes comme les femmes, à tout âge adulte, avec un pic entre 40 et 65 ans environ.
Anatomie rapide : pourquoi ce nerf est-il si vulnérable ?
Le nerf pudendal prend naissance au niveau des racines sacrées S2-S3-S4. Il sort du bassin par la grande échancrure sciatique, contourne l’épine sciatique, puis rentre dans le petit bassin avant de cheminer dans le canal d’Alcock (ou canal pudendal), accompagné de son artère et veine. Il se divise ensuite en trois branches principales :
- le nerf rectal inférieur,
- le nerf périnéal,
- le nerf dorsal du clitoris ou du pénis.
Sa localisation très proche d’os, de ligaments et de muscles le rend particulièrement exposé aux compressions, étirements ou irritations sur son trajet.
Qu’est-ce qui définit vraiment la névralgie pudendale ?
Il s’agit d’une douleur neuropathique chronique liée à une irritation, une inflammation ou une compression du nerf pudendal. Elle se distingue des autres douleurs pelviennes chroniques par des critères précis, validés depuis 2008 par le groupe de Nantes (toujours référence internationale en 2025).
Critères essentiels (au moins 4 ou 5 doivent être présents) :
- Douleur située dans le territoire du nerf : périnée, zone « en selle » (de l’anus au clitoris/pénis)
- Douleur nettement aggravée en position assise
- Absence de douleur nocturne (le patient peut dormir)
- Pas de perte de sensibilité objective à l’examen neurologique
- Soulagement (même partiel) après un test d’infiltration anesthésique ciblé du nerf
Signes associés fréquents :
- Sensation de brûlure, décharges électriques, picotements
- Troubles urinaires (dysurie, faux besoins, douleur après miction)
- Gêne sexuelle (dyspareunie, douleur post-éjaculation)
- Hypersensibilité au toucher du périnée
- Douleurs lors de la défécation
D’où vient cette compression ?
Dans la majorité des cas, la cause est mécanique. Les facteurs les plus courants incluent :
- Station assise prolongée ou répétée (cyclistes, chauffeurs, métiers sédentaires)
- Traumatismes : chute sur le coccyx/sacrum, accouchement difficile ou instrumentalisé
- Chirurgies pelviennes, gynécologiques ou proctologiques
- Tensions chroniques ou spasmes du plancher pelvien (muscles obturateur interne, releveurs de l’anus…)
- Cicatrices fibreuses ou adhérences post-opératoires
- Troubles de la statique pelvienne (prolapsus…)
Plus rarement, des pathologies systémiques peuvent contribuer : diabète, sclérose en plaques, maladie de Lyme, infections récurrentes (herpès, urinaires…).
La prévalence reste difficile à chiffrer précisément, mais on estime une légère prédominance féminine (environ 6 femmes pour 4 hommes), liée notamment aux particularités anatomiques du bassin féminin et aux conséquences obstétricales.
Comment confirmer le diagnostic ?
Il repose avant tout sur un examen clinique minutieux par un spécialiste. Aucun examen n’est à lui seul décisif, mais certains sont très utiles pour éliminer d’autres pathologies :
- IRM pelvienne ciblée (recherche de conflit dans le canal d’Alcock)
- Échographie dynamique du périnée
- Électromyogramme (moins systématique aujourd’hui)
- Test d’infiltration diagnostique (anesthésique local) : élément clé
Selon les cas, un bilan complémentaire urologique, gynécologique, proctologique ou sexologique est proposé.
Les options thérapeutiques : une approche progressive et pluridisciplinaire
L’objectif est double : soulager la douleur et retrouver une qualité de vie acceptable. Le traitement est toujours progressif et adapté.
- Mesures de base (hygiéno-diététiques et posturales
- - Limiter drastiquement le temps assis
- Utiliser des coussins en forme de U ou donut
- Améliorer la posture globale - Rééducation spécialisée du plancher pelvien
- - Techniques de détente musculaire (trigger points, respiration abdominale, étirements doux
- Biofeedback, électrostimulation, manipulations myofasciales - Médicaments
- Antalgiques classiques
- Antineuropathiques : gabapentine, prégabaline
- Antidépresseurs à visée antidouleur (tricycliques, IRSN)
- Myorelaxants si spasmes marqués - Infiltrations
- - Anesthésique + corticoïdes, guidées par échographie ou scanner
- Intérêt diagnostique + thérapeutique (à renouveler si bon effet) - Techniques interventionnelles plus avancées
- - Neuromodulation sacrée (S3 le plus souvent) – technique la plus établie en cas d’échec
- Cryoneurolyse du nerf pudendal : technique mini-invasive récente qui utilise le froid pour bloquer temporairement la conduction douloureuse (résultats prometteurs dans les centres spécialisés)
- Radiofréquence pulsée (encore en évaluation) - Chirurgie de décompression
- - Réservée aux cas très résistants après tests d’infiltration positifs
- Voies d’abord variées (transglutéale, transischio-rectale, laparoscopique)
- À réaliser dans des centres experts
Quel rôle joue l’ostéopathie dans cette prise en charge ?
L’ostéopathie, lorsqu’elle est réalisée par un praticien formé à la pelvipérinéologie, occupe une place de choix dans l’approche conservatrice et complémentaire.
L’ostéopathe va rechercher et traiter :
- Les restrictions de mobilité du bassin (sacro-iliaques, sacro-coccygienne, symphyse pubienne)
- Les tensions ligamentaires profondes (ligaments sacro-épineux, sacro-tubéreux)
- Les spasmes ou rétractions musculaires du plancher pelvien (obturateurs internes, piriformes…)
- Les adhérences cicatricielles post-chirurgicales ou post-partum
- Les déséquilibres du système viscéral (vessie, utérus, rectum) et du diaphragme
Ces techniques douces et non invasives visent à libérer les contraintes mécaniques, à rétablir une mobilité normale des tissus et à diminuer la sensibilisation nerveuse. De nombreux patients constatent une nette réduction de l’intensité douloureuse, une meilleure tolérance à la station assise et une sensation de « récupération corporelle » progressive.
L’ostéopathie s’intègre parfaitement dans une équipe pluridisciplinaire : elle complète la rééducation périnéale, soutient l’effet des médicaments et prépare ou accompagne une éventuelle chirurgie.
Quel avenir pour les patients ?
Le pronostic dépend énormément de :
- La rapidité du diagnostic
- La cause sous-jacente (mécanique pure ou mixte)
- L’adhésion à une prise en charge globale et prolongée
Une prise en charge précoce et coordonnée (médecin de la douleur, kinésithérapeute, ostéopathe, psychologue, sexologue…) permet souvent de rompre le cercle vicieux douleur → contracture → hypersensibilisation et d’éviter l’isolement, la dépression ou l’arrêt professionnel.
En conclusion, la névralgie pudendale n’est plus une fatalité. Si elle reste une pathologie complexe, les connaissances et les outils thérapeutiques ont beaucoup progressé ces dernières années. L’ostéopathie spécialisée, en travaillant sur les causes mécaniques et posturales, offre un accompagnement précieux et souvent déterminant dans les formes non chirurgicales, ou en soutien pré/post-opératoire. Ne restez pas seul(e) avec cette douleur : une évaluation experte et une stratégie personnalisée ouvrent presque toujours la voie vers un mieux-être significatif et durable
